LIDAR au Mont Sacon : 3 CR en 1!

Au déséquipement du Bassia j'ai pu rencontrer Philippe Mathios, c'est un nom qui m’était familier, logique lorsqu’on pratique la spéléologie à cheval entre le 31 et le 65. Lors de nos discussions nous évoquons le potentiel des données LIDAR et quelques jours après Philippe me transmet les données et les cavités qu'il a déjà repéré sur le Mont Sacon. Sans plus attendre je complète la prospection sur QGIS (logiciel de cartographie) et je trouve quelques autres points à aller voir. 


23/11/24

Je part sur le terrain accompagné de Léo Malfuson, un bon copain devenu mon mentor parapentesque, à moi de lui prouver que l'aventure se trouve aussi sous terre ! On choisit d'aller voir deux cavités déjà repérée sur le LIDAR par Philippe, proches d'une piste car Léo sort juste d'une sérieuse blessure à la cheville. C'est royal, 10mn de marche et on tombe effectivement sur une superbe entrée… Trop facile à mon goût pour être de la première mais rien n’est présent sur Karsteau ou ailleurs, il n’y a plus qu’à descendre ce beau P20 d’entrée. On remet ça pour plus tard car nous n’avons pas de matériel, aujourd'hui l’objectif était le repérage de ces deux points, le premier ayant été plus que rentable c’est avec enthousiasme que nous allons voir le second également facilement accessible.


Belle entrée
Première cavité trouvée, ça motive!

Ce dernier est bien plus discret, il est facile de le louper et c’est d’ailleurs assez incroyable qu’il soit apparu sur la carte LIDAR ! Cette fois-ci c’est plus réaliste car une désob doit être effectuée, elle semble facile mais peut-être bien longue. En effet le petit gouffre (R5) se désescalade facilement jusqu'à un amas de blocs, pas de courant d’air mais on pourrait facilement retirer les cailloux en suivant la paroi. Affaires à suivre à temps perdu donc…


Seconde entrée, bien formée mais désob dans mon dos

Nous terminons la journée en vérifiant d’autres points qui avaient déjà moins de potentiel sur le LIDAR. Ces derniers ne donnent absolument rien d’intéressant (dolines, replats et même un abreuvoir oublié!).


24/11/24

Le lendemain nous revenons donc sur place prêt à descendre et topographier le fameux premier gouffre trouvé la veille. Léo étant déjà largement autonome sur corde, je lui laisse la main à l'équipement pour qu’il se familiarise au matériel spécifique de la spéléo (future recrue au bon potentiel!). Pendant ce temps, j'attaque la topo tout en lui donnant quelques conseils lorsque c’est nécessaire. L’équipement est une formalité et quelques pulses plus tard nous sommes au pied du puits d’entrée, sur un gros cône de feuilles et d’humus.


A l'attaque!

Le gouffre semble continuer assez logiquement, le cône n’ayant bouché qu’une des deux options (l’autre semble être une désob facile mais très longue). La suite déroule assez bien, d'abord un ressaut de 4/5m suivi d’une tête de puits, rien d'étroit mais il n’y a plus 36 solutions pour équiper et ça fait déjà quelques minutes qu’une petite pastille noire attire mon attention sur la paroie… Ça ne loupe pas, une fois la tête de puits atteinte un vieux spit planté à moitié nous attends, sûrement depuis bien longtemps. 


Vue bien à l'aplomb du puits d'entrée


Ce n’est donc pas du neuf mais rien d’étonnant, le gouffre était trop imposant et accessible pour être vierge à mon sens. Cela n’entache pas notre motivation, il faut quand même reconnaître et topographier ce gouffre et aucun obstacle pénible à l’horizon. Léo s’exerce au perfo et découvre également les joies de la topo, on prend le temps d’observer d'éventuels départs oubliés mais rien ne s’offre à nous. 


Le spit ayant entaché notre gloire se trouve dans le dos de Léo

Nous descendons un dernier puits d’une dizaine de mètres qui s’achève dans un méandre. Il est assez large mais colmaté par la calcite rapidement, le sol est quand à lui comblé de blocs sans rien à gratter, c’est no future… Au moins nous sommes au bout, avec pile poil ce qu’il fallait de corde (env. 80m), je fignole les détails de la topo pendant que Léo attaque la remontée et je le suis en déséquipant.

À la remontée du puits d’entrée, je profite de l’équipement pour aller mettre le nez dans un affluent méandriforme à mi-puits. Rien d’intéressant, ça cutte franchement et sa partie haute semble très étroite. On ressort avec le jour et ça fait plaisir en hiver, une affaire rondement menée qui nous aura pris environ 4 heures sous terre. En sortant je reçois le message d’un ami qui vient d’avoir un nouvel enfant, cela me rappelle qu’il s’appelle Léo comme mon binôme.. le nom est facilement trouvé. Ne reste plus qu'à mettre ça sur Karsteau et aller voir les autres points !




28/11/24

Je retourne pour voler sur le Sacon, mon objectif est également d’aller prospecter le côté Sud parce-que Philippe y avait aussi repéré des entrées. En effet il y maintenant 40 ans on lui avait indiqué un puits assez important qu’il n’aurait jamais retrouvé. Les conditions sont généreuses pour cette période hivernale et je passe une bonne heure à voler au-dessus de la face Sud, la végétation n’est pas dense et pourtant je ne remarque rien vu du ciel (sur le LIDAR deux “gouffres” apparaissent dont un faisant 4m de diamètre). Mais ça ne veut pas dire grand chose, tout bon spéléo sait que les détails les plus discrets peuvent être prolifiques. 

Une fois posé je file sur zone au plancher des vaches et il y a deux options. La première (à l'ouest du couloir d’accès à la face) ne donne rien, sur le coup je soupçonne le LIDAR d’avoir buggé à cause de la présence de petites barres successives. Soudain ça fait tilt, Maël B. était venu il y a quelques années descendre un gouffre accompagné de son père. Lors d’une séance d'escalade, quelqu'un aurait échappé un casque dans la pente sous la falaise et celui-ci aurait roulé jusqu'à un gouffre, trahissant sa présence. Après un coup de fil avec lui, j'ai bien confirmation, mais cela ne colle pas vraiment avec la description de Philippe qui m’a évoqué un puits d’entrée profond (80m de souvenir?). Maël m’indique à peu près la zone concernée par le gouffre et en effet ça colle avec ses proportions. Bref, à mon avis j'ai juste été impatient et j’aurais dû attendre que le GPS du portable s’actualise un peu mieux. Il reste cependant à vérifier si le gouffre cherché par Philippe était celui du LIDAR, ou si c’était celui de Maël.


La spéléo permet souvent de s'autoarnaquer 

Je file voir l’autre option plus prometteuse avant la nuit, cette fois-ci je suis plus patient et en effet ça finit par payer. Cependant le salaire est bien maigre car il s’agit d’un simple replat/doline dans la pente (voir photo). Je l’avais pressenti en retravaillant l'aspect du rendu LIDAR (pour ceux qui pratiquent, un MNT sans ombrage mais avec des courbes de niveaux de 25cm, cela évite les faux espoirs car certains replats dans les pentes sont similaires aux gouffres lorsqu’on utilise seulement l’ombrage). J’avais vu cette doline en l’air mais bon, you never knows! 


Sainte Barousse

Me contacter si vous désirez consulter les données que j’ai repéré, il reste de quoi faire et j’ai peut être manqué des choses sur QGIS.  Pour information j'ai beaucoup prospecté bredouille sur le Sacon, j’ai rencontré M Gérard Pene ancien président du SC Baronnies (qui a d’ailleurs participé explos du Bassia) ayant participé aux des campagnes des gouffres Cots qui m’a également confirmé la difficulté à trouver des entrées sur ce massif. Nous les avions reconnus avec Adrien L. (Cots n°2 et n°5) et manque de compagnons nous n’avions pas repris les desobs car ces gouffres sont assez ingrats. Il reste cependant un mystère à résoudre au Sacon, la présence de gouffres notables déjà connus, le manque de spéléos locaux, la configuration géologique et les résurgences notables sous le village de Sacoué situé 900m sous le sommet semblent être une bonne équation. À voir ce que nous révélera la suite des prospections LIDAR, affaire à suivre!

Damien V.

Commentaires

  1. Beau compte-rendu Damien, ça fait envie !

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  2. Très beau compte rendu, prospection , découverte, exploration et topographie. On en redemande.

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  3. Merci Damien pour ce CR bien sympa. Belle topo ! Bravo....
    Patrick

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  4. Yes cool ce CR, chouette que les jeunes reprennent du service!
    Thomas

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  5. Superbe topo. Maintenant ce gouffre existe 😉
    ADE

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