Premières explos aux gouffres de la Téoulère
Document Transmis par Alain BRESSAN, topos JP Cantet et Michel DOUAT.
Et si on reparlait du gouffre de La Téoulère, pour la petite histoire…
Par Jean-Pierre CANTET
En Novembre dernier, j’ai eu la bonne surprise de découvrir, sur le blog du GSHP, un compte-rendu de sortie au gouffre de La Téoulère par Jean Noyès, Anthony du GSHP et Sylvain Neveu du SCG. Illustré de belles photos, cet article a ravivé en moi des souvenirs et c’est pourquoi je viens vous en faire part, pour la petite histoire.
En Juillet 1966, avec Jacques et Guy Désangles, nous avons « découvert » le, ou plutôt les gouffres de La Téoulère. Avaient-ils déjà été explorés ? Mystère. Deux d’entre eux paraissaient prometteurs. Aussi, du 13 au 21 Septembre 1966, une douzaine de membres du GSHP et du SCG participent à un camp établi au col de Beyrède, près de la cabane mise gracieusement à notre disposition par la municipalité de la commune. L’objectif principal était l’exploration des gouffres de La Téoulère.
Dès le 14, nous attaquons le gouffre principal (que nous appelions alors P.4), déjà reconnu jusqu’à -30 et qui continuait. Nous descendions aux échelles, selon la méthode De Joly, avec assurance à l’épaule, amarrages par élingues sur arbre ou rocher.
Nous n’avions pas de spits. Après la première verticale (vers -18m), la suite est décalée vers l’Est et on atteint un palier constitué de blocs coincés vers -30 où on établit un relais pour l’assurance. Je ne me souviens pas si on avait amarré des échelles à cet endroit ou si c’était un seul train depuis la surface.
Je suis le premier à descendre et vers -65 je prends pied sur un petit espace, sorte de rimaye, entre la paroi et le glacier qui occupe le fond du puits et qui présente, juste en dessous, un entonnoir de fusion qui semble être la suite. Vers l’Ouest, une salle haute de plafond, au sol recouvert de glace, présente une belle colonne de glace, haute d’au moins une dizaine de mètres, qui débouche de la paroi Nord et qui peut provenir du P.5 situé à quelques mètres au-dessous du P.4.
De l’autre côté, au-delà d’une pente glacée remontante, on devine un replat.
Claude Lucas me rejoint et m’assure alors que je descends dans le puits qui perce le glacier. Le conduit est tortueux, les échelles frottent et risquent de détacher des blocs de glace. Au bout de quelques mètres nous décidons prudemment d’en rester là, sans avoir atteint le fond. Avec nos bottes en caoutchouc il est impossible d’aller sur les pentes glissantes qui nous entourent. Donc, remontée et à revoir avec un matériel plus adapté !
Dans le P.5 voisin, c’est aussi la glace qui nous a arrêtés vers -30.Nous avons revu ce gouffre le 15 Octobre 1967 avec Jacques Désangles et Christiane Rivière et plus tard (1968 ?) avec Jean Brossard, sans plus de résultats.
Au cours du camp de 1966, nous avons exploré ou revu quelques gouffres dans le secteur du Courtaou de la Lit, au-dessus de Laoueils, et vers Tiremouréou, sous le Pène de La Téoulère.
En 1974, le GSHP a repris l’explo des gouffres de La Téoulère ou Prada Grana, désignés P.2 et P.3 sur les coupes publiées en 1991, p.90, pour le 30e anniversaire du club. La jonction entre les deux cavités a été réalisée et un nouveau puits descendu dans le P.2, avec arrêt sur étroiture vers -100
Entre 1966 et 1974 il semble donc y avoir eu une régression nette du glacier, confirmée par les observations réalisées en 2021.
La coupe que j’avais dessinée en 1966 est évidemment très sommaire et approximative. Nous n’avons pas pris de photos à cette époque lâ, ce qui permettrait des comparaisons avec la situation actuelle.
Ces quelques lignes n’ont d’autre but que d’apporter quelques renseignements concernant l’historique des explorations à La Téoulère, tant que la mémoire est encore là. J’avais 20 ans en 1966. Les spéléos passent mais les gouffres restent !
Ont participé au camp de
1966 :
Eliane Amaré ;
Josette Pucheu, Christiane Rivière.
Jean Brossard, Francis
Brumont, Max Cambours, Jean-Pierre Cantet, Guy Désangles, Jacques Désangles,
Jacques Féral, Claude Lucas, Albert Painaud.
Bibliographie :
CANTET J-P. 1967- Camp au
col de Beyrède. Bulletin de la Société
Archéologique du Gers, 1967, 2e trim. pp.254-256.
CANTET J-P. 1967- GSHP,
Activités 1967. Spelunca 1967, n°4,
pp. 317-318.
Collectif GSHP 1991 – 30
ans d’explorations : 1961-1991. Supplément
à L’Echo des Tachous, n°5, Septembre 1991, 115 p.
Photo prise le 15 Octobre 1967 à La Téoulère, avec Jacques Désangles et Christiane Rivière (devenue ensuite son épouse).
Bonjour Jean-Pierre,
RépondreSupprimerEt merci de partager avec nous ces savoureux souvenirs d’exploration ! Votre récit m’interpelle à deux reprises. Premièrement, mais c’est devenu une évidence sur le plan écologique, en un demi-siècle le gouffre de la Téoulère a perdu au moins la moitié de son volume de glace et donc : les effets du réchauffement climatiques ne sont pas visibles uniquement sur Terre mais aussi dessous et ils sont fulgurants ! Deuxièmement, et là c’est plus sur le plan technique, vous nous rappelez que les goujons plantés à l’aide d’un perforateur à batterie, les cordes de nylon, les descendeurs et autres EPI n’ont pas toujours été la norme et qu’il fut un temps ou l’aventure verticale s’écrivait avec un grand A ! Mon grand-père et mon père nous ont initié mon frère et moi, à l’âge où nous jouions encore aux LEGO, à l’utilisations des échelles de spéléo, les souvenirs que j’en garde forcent d’autant plus mon admiration à l’égard de votre exploration !
Au plaisir d’échanger plus longuement avec vous sur cette belle cavité si vous le souhaitez,
Jean Noyès
Merci Jean Pierre pour cette évocation historique précieuse qui nous replonge dans les explorations de l'époque. Tout y est, la ferveur de l'explo, l'audace mais aussi la rigueur qui se traduit concrètement par cette topo détaillée faite sur ce qui pourrait être un cahier d'écolier et au stylo bic. Pas d'informatique, pas de disto X, mais un dessin clair, qui dit tout et qui n'a rien à envier aux représentations actuelles. Quant à la fonte des névés et de la glace souterraine, il n'y a pas grand chose à dire. Elle est avérée et semble inexorable. Certes elle va nous révéler dans certains cas des cavités ou des suites jusqu'alors inconnues, mais cette pseudo satisfaction ne doit pas nous enlever de l'esprit qu'elle annonce un avenir bien sombre pour notre planète.
RépondreSupprimerPatrick
Que ces écrits sont plaisants à lire. Merci
RépondreSupprimer