Week end de folie à Yerse

Après nos explorations dans le gouffre du Beaufort le week-end dernier (c.r. ici), nous décidons de renouveler l'opération afin de profiter à fond de ce bel été indien. . Au programme : désobstruction à Yerse le samedi et poursuite du Beaufort le dimanche. 

Samedi 26  septembre
Avec Sandrine, nous montons le vendredi soir pour être à pied d’œuvre le lendemain, c'est plus cool... Serge arrive à l'aube le samedi matin. Il a fait un bon portage durant la semaine avec notamment 140 m de corde pour le Beaufort.Sandrine préférant prospecter en surface, c'est donc à deux que nous entrons dans le gouffre, un peu avant 9 h. La descente est rapide et en une heure nous sommes à -380 m prêts à en découdre avec les énormes blocs qui nous barrent le passage. Jean nous rejoint à peine une heure plus tard. A trois, il y a du travail pour tout le monde et donc nous ne souffrons pas trop du froid malgré le courant d'air. En plus, nous avons pris une petite bâche pour colmater l'étroiture d'accès à la désobstruction. Cela diminue de façon efficace le débit de l'air. En fin de matinée, nous brisons une grosse dalle qui masquait un vide suffisamment grand pour passer. Nous avons à peine le temps de nous en féliciter que Jean est déjà derrière, dans un conduit pénétrable. "Enlève la bâche, je ne trouve pas la suite" nous crie-t-il. Je retourne à l'étroiture pour libérer le courant d'air et rétablir notre fil conducteur. Revenu sur le chantier, il n'y a plus personne. Ça commence à sentir bon tout ça ! Je retrouve mes deux acolytes dans une lucarne précédant un petit ressaut dans lequel il faut se contorsionner. Au bas, nous parvenons dans un grand laminoir pentu, tapissé d'argile. Nous nous laissons glisser sur ce toboggan qui présente d'évidentes traces de mise en charge. Au bas, une sorte de suçoir amène tout l'air et là, nous l'entendons pour la première fois. La rivière que nous recherchions est sous nos pieds, 10 à 15 m plus bas dans un vide qui résonne bien. Mais pas moyen de la voir car une étroiture nous en interdit l'accès. Le trio est euphorique et avant d'asséner le coup de grâce, nous retournons tranquillement à la désob pour récupérer le matériel et casser un peu la croûte.

Jour de fête à Yerse

 L'ambiance est à la fête, mais nous bâclons un peu notre repas pour vite aller voir ce probable collecteur. Au passage, nous agrandissons quelques étroitures et Serge qui souffrait d'une tendinite au bras semble soudain avoir trouvé un médicament efficace. Pendant que nous nous attaquons au suçoir, il taille un véritable boulevard dans la lucarne. En quelques assauts, le passage est enfin ouvert et un talus d'argile nous amène sans difficulté au bord du ruisseau. Celui-ci s'écoule dans un gros méandre large de 2 m en moyenne, superbement sculpté par l'érosion. En aval et comme cela était prévu, nous tombons assez rapidement sur un beau siphon en relation probable avec celui du Chemin des Dames. Du côté de l'amont, nous avançons d'une vingtaine de mètres jusqu'à un virage qui laisse deviner la suite, sans obstacle, à perte de lampe. Nous reviendrons avec les copains, maintenant plus rien ne presse... Une fois n'est pas coutume, nous rentrerons sans topo, ni photo car mon carnet est resté malheureusement à la maison,ce qui n'était pas prévu, et l'appareil, au début de la désobstruction. Le retour est assez euphorique et nous donne des ailes pour la remontée. Nous sommes dehors vers 17 h 30. Nous allons pouvoir fêter ça tranquillement au refuge avec Alain D. et Étienne qui sont arrivés dans l’après-midi. De leur côté, ils ont refouillé la combe des Puts sans grandes trouvailles tandis-que Sandrine ratissait le contact Crétacé-Marnes à la hauteur de la perte.

Dimanche 27 septembre
Le week-end est loin d'être terminé et nous nous levons à l'aube pour continuer au Beaufort. A 9 h nous entrons dans le gouffre (Alain, Etienne, Jean, Serge, Sandrine et Patrick). Au terminus, c'est à mon tour d'équiper.  C'est un peu comme au rayon fromage des hypermarchés, chacun a son ticket. C'est une chance car le mien m'offre un des plus beaux puits du gouffre. Après un départ en méandre celui-ci s'évase jusqu'à une bonne dizaine de mètres de diamètre, le tout taillé dans un calcaire poli par les ruissellements. J’atterris 40 m plus bas au milieu de quelques blocs épars. La suite est un peu plus haut sur un large balcon. Sandrine a le ticket suivant. 

A -110 m, les parois concrétionnées se resserrent et une grosse coulée stalagmitique
bouche presqu'entièrement le conduit. 


Elle descend un premier redan de 5 à 6 m puis passe la main à Jean qui enchaine un autre de 15 m, après un passage resserré. Nous nous retrouvons tous au bas dans un méandre fossile qui plonge dans le pendage mais après un virage à angle droit, celui-ci se rétrécit brusquement. Ça passe tout juste et une lucarne est agrandie au marteau. Après 10 m d'étroit, la résonance d'un autre puits se fait à nouveau entendre. Celui-ci fait une vingtaine de mètres et s'enchaîne aussitôt avec un autre légèrement moins profond mais qui engloutit nos derniers mètres de corde.


Jean attend son tour vers -160 m, il a le ticket n°95....
 
La suite est un méandre étagé où nous avons le choix entre un ramping au raz de l'eau ou une courte escalade suivie d'une diaclase étroite. Chacun choisit son passage et 15 m plus loin nous retrouvons du volume et un nouveau puits estimé à près d'une trentaine de mètres. Nous sommes à -180 m.
Il ne nous reste plus qu'à remonter tranquillement en faisant la topo sur un carnet de fortune que j'avais au fond de mon sac. Nous sommes dehors vers 15 h 00 en ayant bien conscience d'avoir vécu un week-end hors normes.


  A -180 m, le méandre est barré par une grande coulée stalagmitique
qui a été entaillée par une arrivée d'eau. Au bas, un conduit bas
et humide rejoint une galerie plus vaste terminée par un P.30. 

Le méandre très découpé de -140 m 

Situation des deux gouffres sur fond de carte IGN.
Curieusement, le pendage observé dans le gouffre du Beaufort 
et qui donne l'orientation générale de la cavité, ne correspond pas
à celui  qu'on devrait logiquement trouver en bordure du synclinal.


C.r. Patrick

Commentaires

  1. Bravo, superbe explo, que de Rêves à venir

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  2. Un grand bravo à toute l'équipe.
    Une zone qui va prendre de l'importance, aussi bien en aval qu'en amont.

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  3. Vivement les topos qu'on se régale les yeux... Faute de mieux. Bravo à toute l'équipe de Tachous !

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  4. A lire ces comptes rendu, j'en fini par regretter mon grand âge, d'habiter si loin du massif de Saint Pé et de l'avoir quitté dans les années 80.
    Dans une vie, on est amené à faire des choix qu'il faut assumer même si cela coûte parfois.
    Toutefois pas de regrets et surtout continuez de me faire rêver. Rêve de trouver un débouché sur le fond de ce synclinal tant recherché. Peu importe l'aval ou l'amont.....
    Bravo à toute l'équipe.
    Amitiés.

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    1. Bernard, il ne faut rien regretter, car chacun apporte sa contribution à un moment donné. Nos découvertes actuelles s'appuient bien évidemment sur tout le travail qui a été fait avant. Dans la découverte, ce qui est le plus plaisant, c'est de découvrir ce que l'on cherche. Les premières fortuites n'ont pas la même saveur. Ce collecteur (si c'est bien lui), le GSHP et d'autres ont cherché à l'atteindre depuis plus de 30 ans. C'est comme un relais en course à pieds, c'est nous qui avons passé la ligne d'arrivée et récoltons les applaudissements, mais il ne faut jamais oublier les autres coureurs, ceux qui se sont acharnés dans le 132 par exemple.
      Alain, la topo du Beaufort est sous presse....

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  5. Une petite réflexion sur la similitude des découvertes du GSHP sur St Pé et d'Amalgame sur Llano Carreras à la PSM:
    1- La sima Grande jonctionne avec le Grand Canyon à -465. La même année, le Quéou (superbe article sur le dernier Spélunca au passage) queute sur siphon à -460. Dans les deux gouffres une suite avec courant d'air est repérée dans un méandre à élargir...
    2- Le Yerse queute sur siphon à -400. La même année la Sima de la Niebla (C214) à la Pierre queute sur siphon à -420...
    3- Un gouffre est découvert à proximité immédiate du Yerse et l'explo est interrompue à -180... Tandis que la sima de los cairs (C243) est découverte à proximité immédiate de la Niebla avec une explo interrompue à -186 !!!
    Etonnant non ???

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  6. Alors on devrait bientôt tomber dans un collecteur à la Pierre ......

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