Le gouffre du Pic d'Areng, -400 m et après ?
L'entrée du gouffre |
Il aura donc fallu attendre 56 ans pour que l'on puisse avoir un espoir de réponse. En effet, depuis 6 ans, une petite équipe, dont je me garderai de citer les noms de crainte d'en oublier, s'est attelée à la désobstruction du méandre terminal. Gus vous en dira plus dans un prochain article puisqu'il a été aux premières loges. Il vous racontera les travaux laborieux qu'ils ont du réaliser pour sécuriser le gouffre dans lequel chaque départ de puits se trouvait exposé aux chutes de pierres, il vous racontera les séances de portage pour acheminer du câble, du grillage et des ancrages, pour brocher les verticales, pour agrandir les passages les plus étroits. Bref, un boulot de titan qui a fini par payer puisque, à la fin du mois dernier, Gus et Sylvain débouchaient enfin au sommet d'un puits de 12 m, suivi de près par un autre qui reste à descendre. Mais avant, il fallait combler le retard topo. Celle-ci avait été refaite en juin 2019 jusqu'à la profondeur de -330 m environ (Alain B. Jean-Noël R.).
Lundi soir nous nous retrouvons donc avec Alain chez Gus pour une sortie le lendemain afin de terminer la topographie jusqu'au terminus mais également dans 3 affluents situés à -12 m, -200 m et -245 m.
Marche d'approche matinale. Le Pic d'Areng apparaît entre les 2 bosses du 1° plan |
Mardi 28 septembre 2021
Réveil matinal, il fait encore nuit mais le ciel étoilé annonce une belle journée. Les sacs sont prêts, nous ne traînons pas mais difficile de mettre moins d'une heure pour atteindre le terminus de la piste et le départ du sentier. Nous laissons le 4x4 de Gus à un petit col situé sous le sommet du Templa. La vue est superbe bien que, plus au sud, les sommets soient encore pris dans d'épaisses bandes de nuages. Le sentier, pas toujours tracé, est pratiquement horizontal et chemine tranquillement à flanc, en contournant les sommets. Même si c'est un peu long (1 h) ce n'est pas fatigant et la variété des paysages qui se découvrent derrière chaque bosse suffit à ne pas trouver le temps long.
Le pic d'Areng. Le gouffre s'ouvre sur la croupe à droite du sommet. |
Au détour de l'une d'elles apparaît le pic d'Areng. Encore un petit raidillon et nous voici à l'entrée du gouffre. Le sommet est juste au-dessus. Nous nous préparons au soleil et à 9 h30 nous démarrons la descente.
Premiers "pièges à cailloux" |
et premiers élargissements au-dessus du puits de l'écho (58 m) |
D'emblée nous découvrons tout le travail réalisé pour rendre ce gouffre fréquentable. Les premiers "pièges à cailloux" font leur apparition. C'est vraiment sécurisant et la descente du puits de l'Echo (58 m) se déroule sans craindre de se prendre un cailloux sur la tête. Alain en profite pour filmer.
Les puits s'enchaînent, tous aussi beaux les uns que les autres. On ne quitte jamais vraiment la corde.
Le puits de l'Echo (58 m) |
A -150 m, un éboulis n'a pas pu être sécurisé et comme il plonge dangereusement dans un puits de 50 m, il faut vraiment être vigilant et le mieux consiste à franchir, à la queue leu leu, la main courante permettant de s'en éloigner. La descente reprend, ponctuée par quelques arrêts vidéo ou photo.
Puits du Pont Suspendu (53 m) | |
Vers -150 m, cet éboulis plonge vers le P.50 suivant. |
Puits des 2 relais (50 m) |
Arrivés à -330, nous reprenons la topo. A trois, c'est rapide et vers 12 h 00 nous parvenons au bivouac et au départ du méandre (-366 m). Vu l'heure, nous continuons dans le méandre en laissant les sacs à l'entrée.
Le bivouac a été installé pratiquement à l'entrée du méandre terminal.
A ce niveau, un superbe remplissage composé de graviers et d'argiles varvées
indique que le méandre a dû être presque entièrement comblé à une certaine époque.
Les dimensions changent brutalement et la voûte qu'on a du mal à discerner dans le reste du gouffre ne dépasse pas 3 ou 4 m, voire ponctuellement 2 m. Cela se poursuit ainsi sur près de 80 m et plus nous avançons plus les traces de désobstruction indiquent qu'il fallait vraiment y croire. Mais bientôt nous percevons la résonance indiquant le bout du tunnel. C'est elle qui a du donner du baume au cœur à Gus, Sylvain et Jean-Noël dans leurs derniers assauts.
être le même que celui qu'on aperçoit au bas du P.17 terminal.
Le départ du puits n'est pas très gros mais on retrouve rapidement des volumes semblables à ceux précédant le bivouac. Le conduit large de 2 m remonte tranquillement sur une belle banquette entaillée par le méandre. Petit virage à gauche et nous voici au terminus. Visiblement la morphologie change tout comme la nature de la roche. Le puits, d'environ 17 m de profondeur, est barré, à mi hauteur, par un large palier. Plus bas, on devine un sol plus sombre, probablement argileux et d'une manière générale cela semble moins actif.
De retour de l'autre côté du méandre, vers 15 h, nous cassons la croûte et curieusement, au même moment le courant d'air s'inverse et le méandre se met à aspirer nettement.
Nous ne trainons pas car il reste les affluents à topographier. Celui de -255 m remonte sur une cinquantaine de mètres par deux petits puits de 8 et 9 m. Le fond est colmaté par un éboulis vertical et sans air.
Celui de -200 m est à peu près aussi long et se termine sur des cheminées dans lesquelles s'échappe une partie du courant d'air.
Le dernier (-12 m) est minuscule et se termine sur une diaclase étroite au bout de 5 m...
Sapins d'argile vers -385 m |
Nous ressortons vers 19 h.00. Le soleil décline doucement derrière le pic du midi alors que des lambeaux de nuages semblent vouloir se réfugier dans le creux des vallées. En contrebas, dans la prairie, quelques chevreuils broutent tranquillement tandis qu’au loin, d'un côté comme de l'autre de la crête, monte le brame de plusieurs cerfs. On a presque envie de traîner un peu pour profiter de ce moment magique. Mais il reste un peu de chemin que nous terminerons à la frontale d'autant plus que les genoux d'Alain le font souffrir et le retour lui sera éprouvant.
Un dernier coup d’œil à l'entrée qui s'est remise à souffler. Il fait presque 12° à l'extérieur le courant d'air est à 7,8°. Pas de doute, ce n'est pas encore le régime hivernal. Alors vivement la suite qu'on en sache plus.
Patrick
Merci Patrick pour ce superbe compte rendu. On si croit.
RépondreSupprimerOui , dire que ce p.... de genou m'a fait souffrir, c'est rien de le dire ! Pas tellement dans le gouffre mais sur la marche du retour qui m'a parue sans fin... le 27 Octobre, opération et prothèse ! Pour un début 2022 avec un genou (presque) tout neuf. C'est qu'on a du boulot à Amalgame... Et puis, il faudra topoter la suite de l'Areng qui promet d'être grandiose !
RépondreSupprimerEn tout cas une superbe journée efficace dans une ambiance comme je les aime et en plus dans un gouffre de toute beauté ! Merci Patrick et Gus pour cette belle "tranche de spéléo".
Et bravo encore à Sylvain, Gus et Jean Noël pour le travail titanesque effectué dans ce gouffre... Qui le mérite bien.
Merci Patrick pour ce CR précis et complet ,qui en plus , est bien mis en valeur par ces belles photos. Je suis fier de ce gouffre Baroussais et je vous suis d'autant plus reconnaissant à toi et Alain de le mettre en valeur par vos commentaires et vos photos.
RépondreSupprimerLa journée a été réussi dans tous les sens du terme. Encore merci à vous deux pour votre travail en topographie.
Bien amicalement.
Gus.