Putain, ça y est !
Ça y est ! Me voici à l'entrée du Gouffre Lépineux.
Je me revois plus de 30 ans en arrière essayant d'éclairer avec ma petite lampe électrique le bas des escaliers de ce catafalque en béton posé comme une vilaine verrue sur le lapiaz de La Pierre Saint Martin. Le monument est moche mais l'histoire est belle et tragique à la fois. L'Histoire de La Pierre avec un grand "H"; celle qui a fait rêver des générations de spéléos.
Aujourd'hui me voici à l'entrée du Gouffre avec une grande différence: la grille est ouverte ! Une fenêtre ouverte sur notre Histoire, mon Histoire.
En cet anniversaire des 60 ans des premières explorations du gouffre Lépineux, la Fédération de Spéléologie de Navarre et l'ARSIP ont organisé plusieurs descentes du gouffre mythique avec possibilité de faire la traversée durant la semaine du 31 juillet au 7 août. J'ai bien sûr choisi pour fêter cet anniversaire le 7 août, jour de mon propre anniversaire. Mais aujourd'hui c'est le 5 août et Richard, notre "Professeur" va descendre le puits pour faire quelques observations morphologiques, tectoniques et sédimentaires dans le puits. Mes quelques compétences en géologie font qu'il m'a demandé de l'accompagner et je ne me suis pas fait prier. J'aurais seulement le privilège de faire 2 fois cette traversée appelée "sur la trace des pionniers".
Il est 17 heures. Plus personne ne descendra dans le gouffre maintenant et nous pourrons prendre tout notre temps pour faire des observations, prendre des notes et des photos. Pour moi c'est un prétexte car aller lentement, ce sera surtout déguster la chance que j'ai d'être là...
Je m'équipe méthodiquement. Serge, le Fointibule, nous accompagne profitant lui aussi de l'occasion mais aura aussi une mission: retirer le fil du téléphone qui ne fonctionne plus. Richard et Mickey font des observations au sommet de la doline, repèrent de vieilles concrétions, traces d'une cavité décapitée... Mais je ne suis pas encore concentré sur la géologie. Plein d'images tournent dans ma tête, les bouquins de Queff, Tazieff, Attout, Labeyrie... Tout ça me semble irréel ! Je vais descendre le Lépineux !
Je me revois plus de 30 ans en arrière essayant d'éclairer avec ma petite lampe électrique le bas des escaliers de ce catafalque en béton posé comme une vilaine verrue sur le lapiaz de La Pierre Saint Martin. Le monument est moche mais l'histoire est belle et tragique à la fois. L'Histoire de La Pierre avec un grand "H"; celle qui a fait rêver des générations de spéléos.
Aujourd'hui me voici à l'entrée du Gouffre avec une grande différence: la grille est ouverte ! Une fenêtre ouverte sur notre Histoire, mon Histoire.
En cet anniversaire des 60 ans des premières explorations du gouffre Lépineux, la Fédération de Spéléologie de Navarre et l'ARSIP ont organisé plusieurs descentes du gouffre mythique avec possibilité de faire la traversée durant la semaine du 31 juillet au 7 août. J'ai bien sûr choisi pour fêter cet anniversaire le 7 août, jour de mon propre anniversaire. Mais aujourd'hui c'est le 5 août et Richard, notre "Professeur" va descendre le puits pour faire quelques observations morphologiques, tectoniques et sédimentaires dans le puits. Mes quelques compétences en géologie font qu'il m'a demandé de l'accompagner et je ne me suis pas fait prier. J'aurais seulement le privilège de faire 2 fois cette traversée appelée "sur la trace des pionniers".
Il est 17 heures. Plus personne ne descendra dans le gouffre maintenant et nous pourrons prendre tout notre temps pour faire des observations, prendre des notes et des photos. Pour moi c'est un prétexte car aller lentement, ce sera surtout déguster la chance que j'ai d'être là...
Je m'équipe méthodiquement. Serge, le Fointibule, nous accompagne profitant lui aussi de l'occasion mais aura aussi une mission: retirer le fil du téléphone qui ne fonctionne plus. Richard et Mickey font des observations au sommet de la doline, repèrent de vieilles concrétions, traces d'une cavité décapitée... Mais je ne suis pas encore concentré sur la géologie. Plein d'images tournent dans ma tête, les bouquins de Queff, Tazieff, Attout, Labeyrie... Tout ça me semble irréel ! Je vais descendre le Lépineux !
Mickey nous raconte comment était la doline, où les anciens avaient posé le treuil, le nombre de personnes nécessaire à la descente d'un seul homme.... et referme la grille à clef derrière nous en nous souhaitant une belle balade.
Et ça y est, on descend. Richard passe devant.J'ai la gorge nouée depuis que j'ai franchi la grille. J'ai les larmes aux yeux sans trop savoir pourquoi. Trop d'émotion sans doute. Faut pas que je le montre aux copains.... Je plaisante, je chante, je profite de l'instant présent. Déjà - 80; j'ai pas vu le pendule... Il me faut remonter pour me longer, les copains vont encore se moquer de moi....
Le puits est magnifique, ce n'est pas du tout ce tube ébouleux dont je m'étais fait l'idée à la lecture de nos glorieux prédécesseurs. C'est un puits marbré, lisse, veiné de blanc, à dimension humaine. Il se divise, il tourne, il fait des paliers... De temps en temps des vestiges: des chèvres rouillées et disloquées pour dévier le câble du treuil, des morceaux de bois, un filet de poule censé retenir des tonnes de cailloux, de très vieux amarrages.... L'équipement est tip top. Les verticales s'enchaînent. Je suis vers -220, Richard vient de poser les pieds dans la salle 100 mètres plus bas. Il m'éclaire de sa puissante torche. C'est magique et impressionnant.
A mon tour je débouche au plafond de la salle et bien sûr je ne peux m'empêcher de penser à la chute de Marcel Loubens. Je ferme les yeux, j'essaie de chasser cette image trop souvent imaginée à la lecture et relecture et re-relecture du bouquin de Tazieff ..." la lumière qui monte lentement en tournant puis un cri bref et la chute... le bruit du corps qui rebondit sur la roche et roule dans l'éboulis....." Je crie , ça résonne de la salle Casteret en aval à la salle de Navarre en amont. Un écho gigantesque comme tous les spéléos d'explo rêvent d'en entendre un jour. C'est bon, l'image est partie, je profite à nouveau de la descente plein vide.
Base de la salle Lépineux: la civière de Loubens est toujours là. A nouveau mes pensées font un bond de 30 ans en arrière. C'était une AG de l'ARSIP comme on les faisait autrefois dans différents coins de France. Jean Paul Calvet venait de créer le musée de la spéléologie à Revel et avait proposé à l'ARSIP de récupérer la civière pour l'exposer. J'ai eu l'impression que tout le monde allait dire oui à cette proposition... alors, moi, le petit jeune de 20 ans, timide et boutonneux, bégayant plus que jamais, j'ai pris la parole pour dire que cette civière faisait partie de l'Histoire de La Pierre et n'avait de sens historique que dans son contexte, au bas de ce puits, près de la croix et de son nom gravé par ses amis et près de l'épitaphe marquée au noir de fumée. Cette civière rouillée et disloquée, même restaurée, n'avait rien à faire dans un musée. Elle devait rester là ! Et elle est toujours là et ça me fait énormément plaisir même si d'autres vestiges comme la coiffe du casque ou des pièces métalliques de baudrier ont disparu au cours du temps pillés par des gens bien peu scrupuleux et certainement totalement irrespectueux de ce moment tragique qui bien malgré lui, a fait connaître notre Pierre dans le monde entier.
Direction salle Loubens justement où d'autres observations nous attendent et quelques kilos de cailloux à ramasser pour l'analyse mais pour une fois, Richard ne sera pas trop gourmand. Serait-il devenu raisonnable ? La salle perdue dont parle Labeyrie doit être tout près... pour un peu je chercherais encore un peu mais je l'ai déjà fait à plusieurs reprises sans aucun succès. Peut être c'est tout simplement le haut de la salle Marcel Loubens où il y a ce gros cristal de calcite que Richard est en train de regarder de plus près mais Labeyrie parlait d'une salle plate et ici tout est ébouleux au possible... et Jacques n'est plus là pour nous en parler plus précisément....
Lourdement chargés, nous reprenons le chemin de la sortie. A partir de maintenant on connait par cœur tous les passages, tous les blocs. On va vite. Richard me rappelle l'époque où il avait fallu transporter le groupe électrogène de 40 kilos pour faire du carottage dans les gours pollués de Loubens. Encore un souvenir qui date! Décidemment, ce sera la séquence "nostalgie" cette descente ! Et je me rappelle à la sortie, dans la vieille cabane glacée, Yves Quinif qui nous attendait avec des bières de chez lui. Je me rappelle, c'était de la Rochefort 7 degrés. Il nous a fait un véritable cours sur la bière, la différence entre la 7 et 9 degré, les trappistes, la bière de mars... Jamais je n'ai trouvé une bière aussi délicieuse.... et pourtant j'aime pas la bière !
Sortie du trou vers 22 heures. Il fait encore jour mais plus pour longtemps. La nouvelle cabane qui porte le nom de notre ami Dominique trône sur le terril. Ca sent le bois, le neuf. Elle à l'air bien fragile...
Retour dans la vallée dans le brouillard et sous la pluie. Je sais que les mauvaises langues sont en train de penser "comme d'habitude"...
C'était grand, c'était beau... vivement dimanche que je recommence !
Et ça y est, on descend. Richard passe devant.J'ai la gorge nouée depuis que j'ai franchi la grille. J'ai les larmes aux yeux sans trop savoir pourquoi. Trop d'émotion sans doute. Faut pas que je le montre aux copains.... Je plaisante, je chante, je profite de l'instant présent. Déjà - 80; j'ai pas vu le pendule... Il me faut remonter pour me longer, les copains vont encore se moquer de moi....
Le puits est magnifique, ce n'est pas du tout ce tube ébouleux dont je m'étais fait l'idée à la lecture de nos glorieux prédécesseurs. C'est un puits marbré, lisse, veiné de blanc, à dimension humaine. Il se divise, il tourne, il fait des paliers... De temps en temps des vestiges: des chèvres rouillées et disloquées pour dévier le câble du treuil, des morceaux de bois, un filet de poule censé retenir des tonnes de cailloux, de très vieux amarrages.... L'équipement est tip top. Les verticales s'enchaînent. Je suis vers -220, Richard vient de poser les pieds dans la salle 100 mètres plus bas. Il m'éclaire de sa puissante torche. C'est magique et impressionnant.
A mon tour je débouche au plafond de la salle et bien sûr je ne peux m'empêcher de penser à la chute de Marcel Loubens. Je ferme les yeux, j'essaie de chasser cette image trop souvent imaginée à la lecture et relecture et re-relecture du bouquin de Tazieff ..." la lumière qui monte lentement en tournant puis un cri bref et la chute... le bruit du corps qui rebondit sur la roche et roule dans l'éboulis....." Je crie , ça résonne de la salle Casteret en aval à la salle de Navarre en amont. Un écho gigantesque comme tous les spéléos d'explo rêvent d'en entendre un jour. C'est bon, l'image est partie, je profite à nouveau de la descente plein vide.
Base de la salle Lépineux: la civière de Loubens est toujours là. A nouveau mes pensées font un bond de 30 ans en arrière. C'était une AG de l'ARSIP comme on les faisait autrefois dans différents coins de France. Jean Paul Calvet venait de créer le musée de la spéléologie à Revel et avait proposé à l'ARSIP de récupérer la civière pour l'exposer. J'ai eu l'impression que tout le monde allait dire oui à cette proposition... alors, moi, le petit jeune de 20 ans, timide et boutonneux, bégayant plus que jamais, j'ai pris la parole pour dire que cette civière faisait partie de l'Histoire de La Pierre et n'avait de sens historique que dans son contexte, au bas de ce puits, près de la croix et de son nom gravé par ses amis et près de l'épitaphe marquée au noir de fumée. Cette civière rouillée et disloquée, même restaurée, n'avait rien à faire dans un musée. Elle devait rester là ! Et elle est toujours là et ça me fait énormément plaisir même si d'autres vestiges comme la coiffe du casque ou des pièces métalliques de baudrier ont disparu au cours du temps pillés par des gens bien peu scrupuleux et certainement totalement irrespectueux de ce moment tragique qui bien malgré lui, a fait connaître notre Pierre dans le monde entier.
Direction salle Loubens justement où d'autres observations nous attendent et quelques kilos de cailloux à ramasser pour l'analyse mais pour une fois, Richard ne sera pas trop gourmand. Serait-il devenu raisonnable ? La salle perdue dont parle Labeyrie doit être tout près... pour un peu je chercherais encore un peu mais je l'ai déjà fait à plusieurs reprises sans aucun succès. Peut être c'est tout simplement le haut de la salle Marcel Loubens où il y a ce gros cristal de calcite que Richard est en train de regarder de plus près mais Labeyrie parlait d'une salle plate et ici tout est ébouleux au possible... et Jacques n'est plus là pour nous en parler plus précisément....
Lourdement chargés, nous reprenons le chemin de la sortie. A partir de maintenant on connait par cœur tous les passages, tous les blocs. On va vite. Richard me rappelle l'époque où il avait fallu transporter le groupe électrogène de 40 kilos pour faire du carottage dans les gours pollués de Loubens. Encore un souvenir qui date! Décidemment, ce sera la séquence "nostalgie" cette descente ! Et je me rappelle à la sortie, dans la vieille cabane glacée, Yves Quinif qui nous attendait avec des bières de chez lui. Je me rappelle, c'était de la Rochefort 7 degrés. Il nous a fait un véritable cours sur la bière, la différence entre la 7 et 9 degré, les trappistes, la bière de mars... Jamais je n'ai trouvé une bière aussi délicieuse.... et pourtant j'aime pas la bière !
Sortie du trou vers 22 heures. Il fait encore jour mais plus pour longtemps. La nouvelle cabane qui porte le nom de notre ami Dominique trône sur le terril. Ca sent le bois, le neuf. Elle à l'air bien fragile...
Retour dans la vallée dans le brouillard et sous la pluie. Je sais que les mauvaises langues sont en train de penser "comme d'habitude"...
C'était grand, c'était beau... vivement dimanche que je recommence !
Alors Nikel mon équipement des puits ?
RépondreSupprimerTip Top !!!!!!!
RépondreSupprimerZut, je suis parti au Pérou 8 mois trop tôt... Merci Bubu pour ce beau récit!
RépondreSupprimerSuper ton récit, comme si ony était! Et plein d'émotion(s), merci Bubu
RépondreSupprimerMadeleine