Une nuit au Quéou
Samedi 20 juillet 2025,
Pour Gabriel et moi, ça sera notre première nuit sous terre. À deux, nous partons pour bivouaquer au Gouffre du Quéou, théâtre des explorations de 2011 à 2022 (voir Pyrénées Souterraines N°2, 2025). Voici le récit de notre sortie :
10h30 - départ du parking
C'est par un temps couvert que nous partons en direction du Pic de Larbastan. Nous emportons avec nous notre équipement individuel et les rations pour 4 repas. Le matos de bivouac est déjà sous terre, ce qui nous allège pour la montée. Vers midi nous faisons notre première halte au refuge de l'Aoulhet. À cette heure, les nuages coulent et nous arrivons au gouffre sous un petit crachin. Pas de quoi nous inquiéter.
13h40 - entrée dans le gouffre
Le trou est très facile à trouver. Le pointage nous amène à fleur de paroi, à la limite entre la prairie et la forêt. Sans tarder, nous entrons dans le trou et nous attaquons ce qui sera notre plus grande verticale de la sortie : le P65. Nous nous faufilons ensuite dans le méandre et nous passons les quelques pincements ponctuels. À la côte -150 nous réalisons un dépôt de nourriture pour notre repas de dimanche midi.
Progressivement nous arrivons dans des volumes plus importants. Et c'est en arrivant dans la salle du Mammouth, à la côte -296, que nous comprenons vraiment l'ampleur de cette cavité. Il s'ensuit une rando au cœur de la montagne. Nous cheminons entre les blocs où le balisage et les kerns nous guident dans notre progression. Le canyon du triple "A" porte bien son petit nom : Aérée, Architecturale et Abyssale ! Dans cette galerie, autant haute que large, que nous suivons le fil du cours d'eau. C'est gigAAAntesque !
Ensuite, nous arrivons dans une partie plutôt labyrinthe et basse de plafond. Il n'en est pas moins que les beaux volumes sont toujours là, quand, depuis un balcon, nous avons une vue plongeante sur l'actif une dizaine de mètres en contrebas. Finalement nous arrivons dans la galerie du Scrouitch. Une onomatopée révélatrice du bruit que déposent nos pieds après chaque pas sur ce parterre de choux-fleurs.
17h00 - installation du bivouac
Sur les coups de 17h nous arrivons sur une plage de sable fin, où s'écoule paisiblement la rivière. Il en est fini des innombrables cascades. Là, la rivière s'apaise et devient calme. Vous l'aurez compris, nous sommes rendus à la côte -450, là où nous montons le bivouac pour la nuit. Une fois les deux hamacs tendus, nous partons affronter les eaux froides de la rivière du Prévisionniste.
18h00 - départ pour la rivière
La première partie de la progression est aisée. Nous avons parfois les pieds dans l'eau, mais rien d'insurmontable. On bifurque à droite pour jeter un œil au siphon aval, puis nous remontons direction l'affluent des Sangsues et la suite du réseau. Après avoir fait face à la tempête dans le shunt qui surplombe l'actif, nous finissons à plat ventre dans le laminoir. À cette saison, la mer est calme et les marées sont basses, et nous ne nous mouillerons que les avant-bras et la partie avant de la combinaison. Quelle épreuve !
Des Sangsues, nous en apercevrons quelques unes. Mais ces petites bêtes sont bien ridicules devant le volume qui s'offre à nous. Là, il faut remonter dans la montagne, et arpenter une nouvelle fois des blocs de la taille d'une maisonnette. Et dire qu'ils proviennent du plafond, plusieurs dizaines de mètres au dessus de nos têtes... Savoir cela nous laisse pensif. Mais rien n'arrête notre soif d'explorer qui nous enivre. Nous suivons notre instinct, et nous remontons plus de 150 m en escaladant les blocs. Hélas mauvaise décision, puisque la fatigue nous gagne rapidement. Nous faisons demi-tour avant d'avoir atteint le terminus de cette branche remontante qui culmine à près de 300 m au dessus du point bas de la cavité. Forcément un peu déçus et frustrés de ne pas être allés au bout, mais tout de même contemplatif devant le parcours que nous avons réalisé.
22h00 - retour au bivouac
Le retour au bivouac est rapide. Nous repassons, cette fois dans le sens du courant le laminoir, et nous descendons la rivière. Au bivouac nous nous changeons pour nous mettre au sec et nous enfilons nos pantoufles (l'idée des poches plastiques est d'une grande élégance, merci Damien 😉). On fait la popote, on debrief de la journée, et c'est avec l'esprit tourné vers l'aventure que nous trouvons le sommeil.
9h00 - réveil
A l'aurore, ni le chant des oiseaux ni les rayons du soleil pour nous sortir de nos rêves. En fait, pas d'aurore non plus... Seule la rivière et sa cascade nous donnent nos premiers repères sonores. Nous profitons de notre premier réveil sous terre en nous payant un petit déjeuner copieux. Et c'est avec les effluves du chocolat chaud que nous dressons le timing de la journée qui nous attend.
10h30 - départ du bivouac
Le bivouac est plié. Les duvets et les hamacs sont à nouveau dans les poches étanches, au sec et hors crue, prêts pour accueillir les prochains explorateurs du monde souterrain.
On décolle. On profite encore un instant de cet endroit grandiose pour immortaliser certaines scènes. Cette fois nous trouvons presque du premier coup notre route dans le Labyrinthe du four à Chaux.
13h30 - arrivée au dépôt -150
Au dépôt nous retrouvons nos provisions laissées la veille. Nous les engloutissons rapidement avant de poursuivre. L'étroiture du Chameau est passée sans encombre, comme la remontée du méandre vers la base des puits : ultime effort avant de retrouver la lumière naturelle.
14h30 - sortie du Gouffre
Nous repartons avec des souvenirs gravés à jamais. Il s'agit là d'une très belle expérience. Une première nuit sous terre, à -450 m, qui en appellera d'autres forcément. Et surtout un gouffre hors du commun, avec une histoire toute fraîche. On ressort avec l'envie d'ajouter un nouveau chapitre. Nous reviendrons...
Thibault
Merci Thibault pour ce joli compte rendu. On s'y croirait. Bonnes explos
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